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Le scoutisme est-il une forme de militantisme écologique ?

Est-ce que le militant écologique doit forcément se démarquer par des actes héroïques ? Doit-il être nommé « Alter », « Eco Warrior » ou encore « Freeters » ? Habite-t-il forcément à la campagne, débraillé et les cheveux en bataille ? Vit-il en quasi autarcie et se déplace-t-il en vélo ?

Le scoutisme propose depuis ses débuts un vivre ensemble au plus proche de la nature où chacun fait de son mieux pour laisser le monde un peu meilleur qu’il ne l’était avant sa venue. Simplicité, vie dans la nature et engagement sont ce que vivent les éclaireuses et éclaireurs au quotidien. Être militant écologique serait-il un tout qu’il serait difficile de dissocier de la connaissance de la nature et de la vie avec les autres ? Mais alors le militantisme commencerait-il à 8 ans ?»

Benoît T., membre du Bureau

 

« Vous, les scouts, vous [insérez ici la punch-line de vos copains de collège à qui vous avez malheureusement révélé la raison de votre absence à la dernière boom de la 4e C ]. » Éclaireuse ou éclaireur, vous n’étiez en fait peut-être pas assez populaire pour être invité.e à ladite surboum, mais admettons : le fait est que vous êtes passé aux aveux et que vos interlocuteurs s’entêtent à vérifier, selon un protocole expérimental dont vous êtes le cobaye, la plupart des clichés qui vous accablent. Suspect de catholicisme, vous êtes probablement plus conservateur que le E242 de votre paquet de céréales. En short toute l’année, vous vous régalez de fourmis et de racines et la soirée de vos rêves ressemble probablement à une veillée chants pluvieuse, car oui, vous préférez passer votre mois de juillet à courir dans la forêt et à mener votre vie de manière frugale.

Si « frugal » a probablement été remplacé par « naze » dans le discours de vos brillants contradicteurs, vous devez l’admettre: ils n’ont pas tort lorsqu’ils vous prêtent un penchant pour les grands espaces et un mode de vie simple mais heureux.

Aujourd’hui, votre voisin d’amphi ou votre collègue de bureau essaierait de vous faire le même procès que vous n’hésiteriez probablement pas en lui affirmant que « le scoutisme est une école de la vie. » Une jolie petite formule, prête à l’emploi, qui sonne bien, mais qui ne dit pas grand-chose en réalité. D’ailleurs, si vous lisez cet article, c’est que le scoutisme vous anime toujours et que vous le vivez encore régulièrement. Vous êtes donc probablement dans le même embarras que lorsque vous rasiez les murs des couloirs du collège, puisqu’encore maintenant les pistes de réponses se multiplient et s’embrouillent lorsqu’on vous demande de définir le scoutisme.

Partons donc de l’idée selon laquelle les scouts aiment courir dans les bois et se passer du luxe que leur procurerait leur vie quotidienne. La vie dans la nature constitue en réalité l’un des piliers de la méthode éducative qu’est le scoutisme : la nature offre un cadre privilégié d’expérimentation et d’apprentissage, un cadre de rupture (oui, oui, la même rupture qui faisait probablement flipper vos copains de collège) avec l’introuvable « vraie vie. » La nature, nous en faisons un partenaire éducatif à part entière et sans elle, pas de scoutisme. Abrités dans nos forêts, loin de l’école, du travail et loin des rythmes urbains, nous décidons de créer avec peu de moyens, de briser certaines dépendances et de vivre une « vie simple mais enrichie de relations humaines. »

Le scoutisme a donc à voir avec l’écologie, ce qu’avaient bien compris vos copains de collège, puisqu’il se vit dans un rapport direct et respectueux de l’environnement.

Pourquoi participons-nous à la COP 21 ?

Lors de l’Assemblée Générale du mouvement en 2014, une résolution emmenait le mouvement sur le chemin de la Conférence Paris Climat 2015. Cet événement politique et institutionnel est aussi un moment fort pour tous les acteurs de la société civile qui souhaitent faire entendre leurs voix sur les sujets liés au réchauffement climatique. Pourquoi l’AG a-t-elle fait ce choix nouveau pour notre mouvement, de participer à un grand mouvement citoyen ?

« Éclaireurs unionistes, nous voulons faire de la préservation de l’environnement une priorité collective. » Par ces quelques mots, notre Rapport d’orientation (RO) nous commande d’agir en faveur d’une citoyenneté écologique, en vivant une forme de simplicité volontaire et en connaissant mieux la nature. L’action qu’appelle le mouvement se vit d’abord « sur le terrain », dans les unités, pendant les camps ou pendant les week-ends. Nous campons en effet souvent et sommes à coup sûr dehors dans des forêts ou dans des champs, dont nous profitons des ressources et que nous nous efforçons de laisser propres et intacts. Dans ces forêts ou dans ces champs, nous nous privons du confort que nous procure notre vie de tous les jours et jetons les bases d’une micro-société qui reposera sur les relations humaines et non sur la consommation. Nous nous rendons compte de la biodiversité qui nous entoure et découvrons tel paysage, telle
essence d’arbre qu’il nous revient de préserver. D’une certaine manière, nous pouvons dire que nous vivons le RO sans même y penser, nous avons choisi la nature comme cadre privilégié des activités scoutes. La nature nous impose en effet sa frugalité, exige notre adaptation
et invite au partage. Nous la découvrons en y agissant et sans consommation superflue, nous nous enrichissons du groupe. Notre premier geste de protection de l’environnement repose ainsi sur notre « art de vivre » dans la nature.

Aujourd’hui, ce premier geste ne suffit plus. Nous constatons en effet autour de nous que les paysages changent, que certaines espèces de végétaux ou d’animaux disparaissent ou se raréfient ou que l’impact de notre mode de vie sur notre santé et sur la nature est toujours plus visible.

Au-delà de nos frontières ou de nos cercles de connaissances, les catastrophes climatiques se multiplient – comme l’ouragan Pam au Vanuatu – et les désastres écologiques s’amplifient.

La nature, notre premier partenaire éducatif, est nécessaire à notre action : sans elle, le scoutisme n’est pas possible. En tant que membres d’un mouvement de scoutisme, nous devons prendre acte des risques que nos sociétés font courir aux équilibres climatiques et environnementaux. Nous devons agir et prendre la parole en conséquence, pour affirmer l’urgence d’un changement politique et de la transformation de nos modes de vie.

La priorité dont parle le RO est à l’évidence collective, car la préservation de l’environnement concerne tous les membres des Éclaireuses et Éclaireurs Unionistes de France. Elle concerne l’ensemble des citoyens et l’ensemble des habitants de la planète. Le RO nous dit alors d’être exemplaires en matière de préservation de l’environnement. Cette protection passe désormais par l’affirmation d’une intention éducative précise et plus uniquement sur nos habitudes, nous devons faire plus.

Le RO nous invite également à défendre nos pratiques auprès des autres. C’est le sens de notre participation à la COP 21, décidée lors de l’Assemblée Générale des EEUdF, en janvier 2014.

La COP 21, c’est la 21e « Conference of the Parties », qui se tiendra à Paris en 2015 : elle réunira des représentants des gouvernements de très nombreux pays du monde et hébergera leurs négociations en vue d’un accord intergouvernemental sur le changement climatique. (Pour aller plus loin voir encadré p. 13 sur la COP 21.)

Nous ne serons probablement pas à la table des négociations, mais nous ferons, à l’occasion de cette COP 21, entendre notre voix. Cet événement donne déjà lieu à une mobilisation de la société civile afin d’infléchir le sens des négociations. Il sera l’occasion, nous en avons l’espoir, de voir naître un vaste mouvement social en faveur de la justice climatique.

Nous serons partie prenante de ces mobilisations. Ce choix n’est pas innocent et n’est pas désintéressé : il permet aux éducateurs que nous sommes de former les citoyens de demain. Ce choix est même essentiel et courageux, à l’heure où les crises économiques, sociales et environnementales s’hybrident et se renforcent. Il nous rend légitimes à nous mobiliser et à mettre au service de la préservation de l’environnement nos valeurs et nos engagements.

Paul P., pour la commission Climat et Convivialité