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SNU : les EEUdF souhaitent une autre ambition pour la jeunesse

Clichy, le 27 juin 2019


Qu’est-ce que le SNU ?

Le Service National Universel (SNU) est mis en place dans sa phase de test à partir de cette année 2019.

Le SNU vise, selon la communication du Gouvernement, à proposer un moment de « cohésion visant à recréer le socle d’un creuset républicain et transmettre le goût de l’engagement », à « impliquer la jeunesse française dans la vie de la Nation » et à « promouvoir la notion d’engagement et favoriser un sentiment d’unité nationale autour de valeurs communes ».

Concrètement, ce service qui s’adresse aux jeunes de 16 ans environ, s’articule en trois temps : 15 jours en internat ; 15 jours au service d’une mission d’intérêt général ; une proposition facultative de trois mois en service civique.

Une première phase de test a été lancée en juin 2019 avec au alentour de 2000 volontaires. Une loi devrait arriver aux parlementaires à l’automne 2019 pour rendre ce service progressivement obligatoire pour chaque tranche d’âge avant 2026 au plus tard.

Le SNU de notre point de vue

Les EEUdF en tant qu’association de jeunesse et d’éducation populaire ont pris leur place dans le débat dès l’émergence du projet aux côtés d’autres associations.

Nous avions partagé nos réserves quant aux objectifs fixés et la mise en œuvre applicable, cependant cela n’a pas été entendu.

Si certains enjeux du SNU peuvent paraîtres louables, le projet présenté nous semble peu pédagogique, contraire à notre idée de la liberté, particulièrement coûteux pour les finances publiques et faisant fi des nombreuses structures qui existent déjà en France.

Peu pédagogique car les premiers retours du SNU montrent des activités peu ambitieuses, infantilisantes voire contre-productives : une pédagogie par le haut où les participants et participantes restent passifs et passives. La forme militarisée de l’encadrement est contraire à notre vision de la jeunesse.

Contraire à notre idée de la liberté : Nous dénonçons ce lien de contrainte de l’engagement, car les jeunes doivent être volontaires. C’est le sens de la Promesse scoute qui est une cérémonie d’engagement de l’enfant ou du jeune dans le groupe.

Particulièrement coûteux car le SNU couterait a minima, 1 600 000 000 d’euros par an, soit 2 000 euros par participant ou participante. Un engagement fort qui pourrait être mieux affecté pour servir plus concrètement les organismes qui s’engagent au service de l’éducation. Prenons le nécessaire soutien aux classes natures, aux colos, l’importance des emplois aidés pour faire vivre un tissu associatif parfois fragile, etc.

 Sans lien avec le tissu local : Si le gouvernement veut travailler sur la proximité humaine, il vaut mieux aider les associations à se déployer sur tout le territoire. Pendant 15 jours, les jeunes vont découvrir des associations mais qu’ils ne retrouveront pas dans leur quartier ensuite.

En ce sens, nous ne soutenons pas le projet du SNU, et appelons le gouvernement à revoir les moyens de répondre aux objectifs fixés.

Nous affirmons que…

 … la jeunesse est engagée 

La force de l’engagement réside dans le choix qui a été fait de le prendre. Or contraindre qui que ce soit à s’engager c’est perdre cette essence même. Loin du portrait qui est fait de la jeunesse, nous soutenons que la jeunesse sait s’engager et le fait. Nous le voyons à travers par exemple les enjeux environnementaux, l’accueil des enfants réfugié·es et également dans les différents projets menés à travers notre association.

Le projet du scoutisme est le témoin de l’engagement de la jeunesse, dès le plus jeune âge avec le choix que font certains et certaines de prononcer leur Promesse scoute à travers une cérémonie d’engagement au sein d’un groupe dans lequel l’enfant ou le jeune a évolué.

A travers notre projet éducatif, nous permettons aux jeunes et enfants de se connaître, grandir, rencontrer, agir, découvrir ce qui fait sens pour lui ou pour elle, c’est à travers son parcours qu’il ou elle fait le choix de s’engager. Nous constatons aussi que certains et certaines aimeraient pouvoir s’engager, sans pouvoir le faire. Ce qui leur manque, c’est bien des conditions économiques et sociales adaptées qui ne seraient pas un frein à l’engagement et au bénévolat.

Nous avons confiance dans la jeunesse et son sens de l’engagement pour soi, l’autre, la société ou la planète. Nous devons bien sûr aussi penser les nouvelles formes d’engagement et ouvrir toujours plus nos associations pour que chacun et chacune puisse y trouver un espace pour vivre son action au service de la société.

… la mixité sociale et territoriale est un enjeu global qui ne concerne pas seulement la jeunesse

Afin de développer la rencontre, la mixité, la démarche doit être générale. Pour cela le gouvernement pourrait soutenir les associations et les actions qui existent déjà mais qui peinent à faire vivre leur projet faute de moyens. Il faut favoriser et accompagner les politiques en faveur du logement pour tous et toutes, donner des moyens et de l’ambition à l’éducation publique.

La mixité sociale doit être une réalité de vie et du terrain, pas un échantillon testé durant 1 mois loin des réalités de vie des jeunes. C’est en permettant aux associations de se développer que les jeunes pourront s’y engager.

Le gouvernement a la possibilité d’agir sur d’autres leviers de mixité sociale plus efficaces que la création d’un nouveau service. Politique émancipatrice d’éducation nationale, aménagement du territoire, résorption des inégalités, lutte contre le réchauffement global… Que l’Etat se saisisse de ses compétences et il constatera que les jeunes répondent présent·es pour se saisir de leur avenir.

Ce projet devrait concerner 800.000 jeunes par an volontaires parfois, réticent·es sans doute aussi, à travers de nombreux programmes, nous questionnons le fait que chacun des services puisse être de qualité et bienveillant.

… l’Etat doit soutenir financièrement les associations existantes

Le projet du SNU représente à minima une dépense de 1.6 milliards d’euros par an, cette somme nouvelle dans les dépenses de l’Etat s’imputera forcément à d’autres dépenses qui existaient par le passé. Les associations subissent de nombreuses coupes budgétaire venant de l’Etat, nous nous inquiétons d’une baisse des autres enveloppes pour les associations et les instances qui s’engagent pour la jeunesse (l’éducation populaire actuellement touche 500 millions d’euros par an).

Concrètement, la suppression des emplois aidés constitue pour le tissu associatif une perte significative. Il en va de même de la baisse significative des financements à travers différentes fondations qui subissent la suppression de l’ISF. Les évolutions mises en place depuis deux ans impactent le budget de notre association de plus de cent mille euros par an, une réalité malheureusement partagée par de nombreuses associations.

… La liberté de conviction et religion est un droit fondamental

 Nous craignons fortement que le SNU soit demain un espace de restriction de la liberté d’expression. La capacité à exprimer ses convictions politiques, philosophiques et religieuses est très fortement encadrée et limitée en imposant une pseudo neutralité aux jeunes participant·es. Une vision contraire à la liberté mais aussi au principe de laïcité. Derrière cela, nous y voyons une volonté, hélas trop présente dans notre société, de refuser des pratiques religieuses et de stigmatiser certains groupes sociaux et culturels. Le cadre du SNU, espace de contrainte, n’assure pas la liberté de conscience et ne permet pas le libre exercice du culte, pourtant reconnue comme liberté fondamentale. Association protestante ouverte à tous et toutes, nous pensons l’ouverture à l’autre dans sa diversité comme une richesse.

Faire connaître notre désaccord

En tant qu’association, nous continuons à nous engager sur cette question afin de promouvoir des alternatives à la proposition du gouvernement, afin de mettre en avant le travail et les actions des associations de jeunesse, de mixité sociale, d’engagement et d’éducation populaire.

Le conseil d’administration de juin a réaffirmé son engagement et sa volonté de porter un plaidoyer fort en faveur de la jeunesse et de l’éducation populaire et contre le projet actuel du SNU.

Chacun et chacune des membres de l’association, en tant que citoyen·ne acteur et actrice de la société peut aussi faire le choix d’exprimer son point de vue sur ce sujet.

Nous invitons tous et toutes nos membres et ami·es à se renseigner sur le sujet et à en discuter avec leurs proches. Le temps du bilan de cette première phase arrivera, celui du débat parlementaire aussi. Nous serons au rendez-vous, nous poursuivrons ce travail d’interpellation, fidèles à nos valeurs.

Des initiatives existent déjà, à titre informatif, une pétition pour dire “Non au SNU” est accessible sur ce lien.

A lire aussi l’interview de Julien, membre du bureau des EEUdF dans le journal Réforme

SNU : incompatible avec la vision des EEUDF

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